Le compte Twitter de Donald Trump fait l’objet de suspension définitive suite à des émeutes au Capitole. Liberté d’expression du Président américain sortant mise à mal ? Le réseau social justifie la manœuvre par la nécessité de lutter contre l’incitation à la violence véhiculée par ses publications. Une oligarchie numérique menace-t-elle les démocraties ? L’État de Floride aux USA adopte une nouvelle loi qui dresse un listing d’amendes pour les plateformes qui bannissent les politiciens.
La loi rend illégal le bannissement d'un candidat à un poste d'État pendant plus de 14 jours. La mesure semble viser l'interdiction permanente que les plateformes de réseaux sociaux font peser sur les comptes de Donald Trump. Les entreprises seraient condamnées à une amende de 250 000 dollars par jour pour les cas d’exclusion d’un candidat à un poste au niveau de l'État. L'amende est moins élevée pour les candidats à d'autres fonctions. Grosso modo, les montants d’amendes varient entre 25 000 et 250 000 dollars par jour.
La nouvelle loi stipule que les plateformes ne peuvent pas supprimer ou donner la priorité au contenu d'une entreprise de la filière journalistique qui atteint une certaine taille. Ces dernières sont classées comme des entités qui font des affaires en Floride et qui ont au moins 100 000 utilisateurs actifs mensuels ou 50 000 abonnés payants. La mesure fait suite à la limitation par Facebook et Twitter de la portée d’un article du New York Post sur le contenu d'un ordinateur portable appartenant, selon le journal, à Hunter Biden, le fils cadet du président Biden.
En vertu de la loi, les plateformes sont également tenues d'indiquer clairement comment elles décident de retirer un contenu ou de le laisser en ligne. Les utilisateurs pourraient poursuivre la plateforme s'ils estiment que ces conditions sont appliquées de manière incohérente.
Un amendement tardif au nouveau texte de loi exempte les entreprises de son application si elles possèdent un parc à thème ou un lieu de divertissement de plus de 25 acres. Cela signifie qu'il est peu probable que la loi s'applique aux sites Web appartenant à Disney qui exploite le Walt Disney World Resort et à Comcast, qui possède Universal Studios Florida.
Controverses autour de la loi SB7072
Suite à la suspension du compte Twitter de Donald Trump, le ministre français de de l'Économie et des Finances – Bruno le Maire – s’était positionné : « Ce qui me choque dans la fermeture du compte Twitter de Donald Trump est que ce soit Twitter qui ferme. La régulation des gens du numérique ne peut pas se faire par l'oligarchie numérique elle-même. L'oligarchie digitale est une des menaces qui pèsent sur les États et sur les démocraties. La régulation est nécessaire, mais doit se faire par le peuple souverain, par les États et par la justice. »
Même son de cloche en Allemagne avec la sortie du porte-parole d’Angela Merkel : « La chancelière considère la suspension définitive du compte d’un président en fonction comme problématique. Des droits tels que la liberté d’expression peuvent faire l’objet d’entraves, mais par la loi et dans le cadre défini par le législateur et non sur la décision d’une entreprise. »
La situation mettait en lumière un point de désaccord majeur entre les États-Unis et l'Europe sur la manière de réglementer les plateformes de médias sociaux. L'UE veut donner aux régulateurs plus de pouvoirs pour obliger les plateformes Internet telles que Facebook ou Twitter à supprimer les contenus illégaux. Elle vient d’ailleurs de faire passer une loi controversée qui impose le retrait des contenus dits terroristes en une heure. Aux États-Unis par contre la surveillance des contenus publiés sur leurs plateformes relevait jusqu’ici des fournisseurs de services en ligne. Néanmoins, des mesures politiques visant à restreindre leurs libertés réglementaires soient de plus en plus fréquentes. Plusieurs membres du Congrès travaillent sur des projets de loi qui limiteraient les protections juridiques dont disposent les entreprises de médias sociaux pour être poursuivies en justice pour des contenus tiers publiés sur leurs sites. D'autres font pression en faveur d'un nouveau projet de loi fédéral sur la protection des données, qui pourrait refléter le Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD) de l’Union européenne.
Les débats en lien aux pouvoirs des réseaux sociaux et à l’interprétation à donner à la liberté d’expression font rage. Les intervenants se regroupent en plusieurs factions dont : celles qui pensent que les réseaux sociaux ne sont ni des services publics, ni bénéficiaires d’un monopole en matière de communication et celles qui pensent que ces plateformes peuvent être considérées comme des services publics si on les considère sous l’angle de leur expansion.
La loi SB7072 fait l’objet d’une controverse supplémentaire en lien avec sa légalité. Elle pourrait faire l’objet d’annulation si les tribunaux estiment qu'elle est contraire à l'article 230 du Communications Decency Act qui exonère largement les plateformes de toute responsabilité pour les activités de modération menées de bonne foi. Elle pourrait également faire l'objet d'une contestation constitutionnelle en vertu du premier amendement, qui a été interprété comme empêchant largement l'ingérence du gouvernement dans le discours des entreprises.
Source : speech du gouverneur de Floride
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Le , par Patrick Ruiz
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